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par Céline Normandin

Malgré l’incertitude économique, la période post pandémique s’avère prolifique pour toute la grappe industrielle gravitant autour de l’aluminium, annonciatrice d’une possible nouvelle ère pour le métal. Aluminum USA, la grande messe de l’aluminium, était de retour cette année, plus précisément les 25 et 26 octobre derniers aux États-Unis, à Nashville au Tennessee. L’événement bisannuel lancé en 2015 est revenu dans la ville du country après un passage en 2021 à Louisville au Kentucky.

Selon ses organisateurs, Aluminum USA est un événement industriel couvrant l’ensemble de la chaine de valeur, de l’exploitation minière, en passant par la coulée, jusqu’à la fabrication. Il s’agit surtout d’un forum qui réunit les principaux fournisseurs et professionnels de l’industrie. Des  ingénieurs, des producteurs, des transformateurs, des fournisseurs de technologies et des fabricants sont alors regroupés sous un même toit. On y retrouve également des secteurs tels que l’automobile, l’aérospatiale, le bâtiment et la construction, l’emballage et l’électronique.

Il s’agit donc d’un rendez-vous incontournable pour l’industrie d’ici et d’ailleurs, alors que la période actuelle est marquée par une effervescence particulière pour l’aluminium.

Quand la solution passe par l’aluminium

Le secteur parait en effet épargné par le ressac économique causé par la pandémie. Partout, les économistes tirent la sonnette d’alarme. Le rehaussement des taux d’intérêt devrait conduire inévitablement selon eux à une récession. Mais malgré l’inflation et l’incertitude, l’humeur de deux des participants québécois qui étaient présents à l’événement est plus que positive.

Patrice Côté, dirigeant de Dynamic Concept de Saguenay.

« La COVID-19 a agi comme élément perturbateur et a accéléré certaines tendances (…) Des secteurs se sont développés en occident qui favorisent l’aluminium », déclare Patrice Côté, dirigeant de Dynamic Concept de Saguenay.

Éloïse Harvey, la chef de la direction d’EPIQ Machinerie.

« Il y a eu dans les deux dernières années plus d’investissements en capital que dans la décennie au complet », ajoute la cheffe de la direction d’EPIQ Machinerie, Éloïse Harvey. « L’ère est à la décarbonation et, entre autres, aux solutions évitant les produits dérivés du pétrole, comme le plastique ». Dans ce contexte, explique-t-elle, l’aluminium s’avère être une solution idéale.

Les deux chefs d’entreprise qui faisaient partie de cette délégation québécoise ont raison d’être optimistes. Selon Martin Lefebvre, chef des placements de Banque Nationale Investissements, les entreprises manufacturières américaines s’apprêtent à injecter les plus importantes sommes dans la modernisation de leurs infrastructures depuis les années 80.

L’Inflation Reduction Act, loi américaine votée en 2022, n’est pas étrangère à cette ruée. Elle vise à attirer les investissements massifs dans la construction d’usines clefs dans la transition énergétique grâce à de généreux incitatifs fiscaux. Elle encourage en plus la diminution des gaz à effet de serre dans le but de réduire leur niveau de 40 % d’ici 2030. Selon Goldman Sachs, cette loi suscitera d’ici 2032 aux États-Unis des investissements de 3000 milliards de dollars dans les technologies à faible émission de carbone.

Les salons commerciaux, toujours pertinents

Le moment fût donc plus que propice pour Dynamic Concept et EPIQ Machinerie dont les activités respectives correspondent exactement aux besoins et demandes actuelles.

Dynamic Concept fournit des services d’ingénierie spécialisés ainsi que des équipements technologiques à des producteurs transformateurs d’aluminium. L’entreprise exécute également des études de faisabilité visant entre autres à augmenter la productivité, réduire les coûts d’opération et réduire l’empreinte carbone. Pour sa part, EPIQ Machinerie est née de la fusion entre deux équipementiers québécois. Elle se concentre sur le secteur primaire et secondaire, plus particulièrement auprès des usines qui souhaiteraient automatiser et robotiser leurs activités, un marché à 70 % à l’international et principalement aux États-Unis. « On offre des solutions pour l’industrie lourde, essentiellement le secteur de l’aluminium et des pâtes et papier », résume Mme Harvey.

Avec l’arrêt quasi complet de tous les événements internationaux durant la pandémie, le secteur événementiel s’est interrogé sur la reprise des congrès, salons et autres. C’est un événement incontournable pour EPIQ, en raison de l’importance de leurs activités aux États-Unis. Une équipe de 10 représentants  était d’ailleurs affectée au salon. Mme Harvey comptait bien sur son équipe pour aller sur le plancher afin de voir ce qui se fait aux États-Unis et en Europe, trouver d’éventuels partenaires et recueillir des idées d’innovation en plus de rencontrer des clients.

Patrice Côté considère pour sa part qu’il était très important d’être sur place, en personne, à ce type d’événement. « On offre des solutions sur mesure. Pour bien les comprendre, on a besoin de bien les communiquer. C’est un événement idéal où on peut créer un lien de confiance, comparativement à Teams où on atteint un certain niveau. Ça nous avait manqué. »

Des retombées attendues

Il faut dire que Dynamic Concept et EPIQ Machinerie ont le vent dans les voiles. Étant présent autant sur les marchés européens qu’américains, les deux dirigeants soulignent que les enjeux sur ces territoires sont différents mais tous aussi urgents.

Dans le cas de Dynamic Concept, le secteur du recyclage est celui qui prends les devants aux États-Unis mais l’état d’esprit est le même des deux côtés de l’Atlantique. « Les acteurs comprennent très bien qu’il y a une urgence d’agir. Il y a une pression qui s’exerce sur le secteur et le désir de changement du marché est très fort ».

EPIQ Machinerie vient tout juste de s’incorporer aux États-Unis. L’entreprise compte y établir une branche commerciale. Avoir été sur place à Nashville à ce moment est doublement important pour l’entreprise, déclare Mme Harvey. « Avec notre expertise développée au Québec dans les centres de coulée, le salon nous  a permis de rejoindre les usines secondaires américaines qui représentent une grosse partie de la clientèle ». Elle mise également sur le phénomène de la relocalisation pour mettre de l’avant le savoir-faire de son entreprise. La pandémie a mis en relief les risques associés à la mondialisation et même si ce mouvement n’est pas près de s’éteindre, une tendance se dessine vers le réinvestissement local du secteur manufacturier, pour des raisons autant économiques que politiques.

Équipe Québec

Les deux entreprises comptent une carte de plus dans leur manche puisqu’elles font partie de la délégation québécoise qui s’est déplacée à Nashville. Questionnés sur l’impact d’une présence gouvernementale, les dirigeants sont tous les deux d’accord sur l’impact positif d’une délégation pour eux-mêmes, mais aussi le secteur de l’aluminium au Québec.

« Ça apporte le message que le Québec veut travailler avec l’industrie, que c’est une industrie dans laquelle on veut investir », souligne le PDG de Dynamic Concept.

« L’industrie de l’aluminium est très soudée entre les deux pays. Il y a une forme de respect et même d’admiration pour ce qui se fait, comme l’organisation d’une délégation québécoise qui montre que le secteur bénéficie du support du gouvernement », renchérit Eloïse Harvey.

Une délégation, qui vient avec son équipe d’experts et de délégués commerciaux, apporte un soutien grandement apprécié, que ce soit grâce à leur réseau de contacts ou leur expertise sur les marchés hors Québec.

Mme Harvey et M.Côté nourrissent donc de grandes ambitions quant aux retombées d’Aluminum USA. La première compte aussi,  en plus du développement de marché, prospecter le marché en vue de partenariats et d’une possible acquisition américaine, question de bien s’implanter au Sud de la frontière.

Patrice Côté, qui a pour sa part toujours géré la croissance de l’entreprise pour qu’elle demeure sous contrôle, estime que le temps est venu de passer à la deuxième vitesse. « Il y a un potentiel très important de consolider notre présence et d’augmenter nos ventes de manière significative. Le salon pourrait avoir un impact à très long terme ».