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Par céline normandin

L’année 2022 domine toutes les crises possibles : économique, climatique, géopolitique et sanitaire. En fait, le climat d’affaires n’a jamais été aussi difficile depuis la Seconde Guerre mondiale, mais Alcoa a bien l’intention de poursuivre sa route tout en respectant chacun de ses objectifs.

Nommé en juillet 2021 à la présidence d’Alcoa Canada, Louis Langlois, est arrivé en poste à une période difficile : la pandémie occupait encore toute l’attention des gouvernements et des marchés. La chaîne d’approvisionnement se trouvait toujours à gérer les contrecoups du brusque arrêt de l’économie, sonné par le début de la crise sanitaire en 2020.

Un an plus tard, M. Langlois profite du 30e anniversaire de l’Aluminerie de Deschambault pour discuter de sa première année à la tête des activités canadiennes d’Alcoa, de la situation actuelle des opérations de l’entreprise mère et des défis qui devront être relevés dans les prochaines années.

AL13 : Quel bilan tirez-vous des 30 ans de Deschambault et quel est son apport selon vous pour Alcoa?

Louis Langlois (LL) : Deschambault est une de nos usines phares pour plusieurs raisons. La structure organisationnelle est différente. On a vraiment une structure de pyramide inversée dans le cadre de l’organisation du travail. Les gens à tous les niveaux sont impliqués dans les prises de décision. Notre centre d’excellence pour nos alumineries à travers le monde est basé à Deschambault. Nos experts en ce qui concerne nos alumineries sont là-bas, tant du côté du processus d’électrolyse que de celui de la fonderie, des alliages et de l’automatisation. Ils couvrent le globe et c’est l’fun de les savoir à Deschambault. On a été en mesure, au fil des ans, d’augmenter son efficacité. L’usine a commencé avec 215 000 tonnes de production, lors de sa construction en 1992, et on est rendu maintenant à 287 000 tonnes. Donc, c’est 70 000 tonnes ou près de 30 % de volume supplémentaire dans la même installation en améliorant les processus.

AL13 : À 30 ans, certaines installations ont besoin d’un peu ou de beaucoup d’amour. Est-ce que vous diriez que l’usine de Deschambault est en bonne condition?

LL : Tout à fait.

AL13 : L’usine est donc bonne pour encore plusieurs années?

LL : Il faut continuer à investir pour la garder compétitive. On a des investissements importants qu’on continue à faire. On a annoncé une nouvelle ligne de petits lingots à Deschambault il y a deux mois. On l’a fait pour augmenter le volume, mais on l’a aussi fait pour la fonderie afin d’aller chercher une prime supplémentaire pour la valeur ajoutée.

AL13 : Qu’en est-il des autres usines d’Alcoa?

LL : Nos trois usines canadiennes sont de très, très bonnes usines. À Baie-Comeau, la technologie est un peu plus vieille que celle de Deschambault, car elle a été construite des années avant avec une autre technologie beaucoup plus polluante. On a tout fermé ça et il nous reste les précuites. Mais pour l’usine, elle ne donne pas son âge. Les gens là-bas sont super engagés : ils veulent garder l’usine, ils veulent attirer des investissements et on continue à investir là-bas.

Journaliste pour Al13, Céline Normandin était présente lors de l’entrevue avec M. Langlois à Montréal.

Le plus gros enjeu à Baie-Comeau est qu’on doit se procurer des anodes à l’externe. Cette aluminerie ne produit pas ses propres anodes, contrairement aux autres ; de surcroît, présentement, avec le prix des matières premières, elle a un défi de plus à s’approvisionner.

L’Aluminerie de Bécancour (ABI) est aussi une super belle usine. La fonderie est très sophistiquée. On peut faire des produits à valeur ajoutée très intéressants. Bon, il y a eu le conflit de travail, il y a déjà deux ans. La technologie est aussi un peu plus vieille que celle de Deschambault, mais elle est compensée par une fonderie à la pointe de la technologie.

On est dans trois communautés différentes. On est le plus gros client d’Hydro-Québec ; presque 100 % de notre demande d’énergie vient d’Hydro-Québec. On est un employeur important pour le Québec. On a dévoilé, en octobre 2021, notre nouvelle vision et notre ambition de se diriger vers zéro émission nette d’ici 2050. Une feuille de route a été partagée, en novembre 2021, à ce sujet. Il y a des technologies qu’on est en train de développer pour y arriver. Ce n’est pas « on a l’ambition, mais on ne sait pas comment on va s’y prendre ». On développe vraiment pour le faire.

ELYSIS est au cœur des projets d’avenir d’Alcoa. L’entreprise souhaite commercialiser la technologie de fusion sans carbone, inventée par Alcoa, qui peut éliminer toutes les émissions directes du processus de fusion de l’aluminium, en produisant de l’oxygène à la place. Louis Langlois discute des étapes à venir.

« Je porte quatre chapeaux. Je suis d’abord un père de deux enfants, deux fantastiques garçons de 14 et de 17 ans ; c’est mon job numéro un. »

AL13 : Mis à part les projets, comment cela se passe-t-il depuis votre nomination?

LL : Je suis président d’Alcoa Canada depuis un peu plus d’un an. Je suis aussi le trésorier pour la compagnie mère et une des deux personnes d’Alcoa sur le conseil d’administration d’ELYSIS, en collaboration avec deux personnes de Rio Tinto.

AL13 : Et depuis un an, comment se présente votre vie en tant que président d’Alcoa Canada?

LL : En mai 2012, je me suis joint à Alcoa Canada en fiscalité. J’avais déjà travaillé en fiscalité chez Bell Canada pendant des années, surtout dans le cas des projets fusions-acquisitions. J’ai joint Alcoa dans le but de travailler en finance. J’ai pris en charge les finances des alumineries américaines et celles du Brésil, tout en étant basé ici à Montréal, avant de devenir responsable des opérations pour ces usines. Par la suite, j’ai eu la responsabilité de la stratégie des alumineries au niveau mondial pendant à peu près quatre ans. Mes responsabilités étaient surtout de réaligner le portefeuille des usines d’Alcoa. On avait des usines qui avaient manqué d’amour pendant plusieurs années. La tâche qu’on a eue, mon équipe et moi, était de se demander : est-ce que c’est une usine qui a un futur ou non à l’intérieur d’Alcoa. Si elle en a un, qu’est qu’il faut qu’on fasse pour la sécuriser. Sinon, c’est quoi l’option : est-ce qu’on peut la vendre ou, malheureusement, la fermer.

AL13 : Donc, on consolide Alcoa sur des bases fermes pour l’avenir…

LL : On veut une compagnie qui est résiliente au travers des cycles du marché. Un des meilleurs moyens de s’assurer que nos usines demeurent compétitives, c’est de ne pas avoir de hauts et de bas dans nos investissements. On voulait être sûrs qu’on n’ait pas d’usines à l’extérieur qui viennent gruger nos liquidités et nous empêchent d’investir dans les cycles.

AL13 : Quel a été le mandat qu’on vous a confié lorsqu’on vous a nommé président d’Alcoa Canada?

LL : Où veut-on amener nos usines dans 10-15 ans? Comment fait-on pour améliorer la productivité? On peut le faire avec des projets d’augmentation d’ampérage pour augmenter le volume de production avec les mêmes installations. On peut aussi faire des investissements dans la fonderie pour aller chercher une prime supplémentaire sur le marché ; c’est avec de l’amélioration continue ou encore des programmes pour réduire notre empreinte environnementale, par exemple la valorisation de nos sous-produits. On a fait beaucoup de progrès et on veut continuer à s’améliorer.

M. Louis Langlois a accueilli l’équipe d’AL13 dans son bureau, à Montréal.

AL13 : Est-ce que c’est en confrontant les deux, l’amélioration de la productivité et la protection de l’environnement?

LL : Les deux, c’est main dans la main.

Al13 : C’est comme ça qu’il faut que ça se passe?

LL : C’est comme ça qu’on doit le voir.

« À toutes les fois qu’il y a des projets à présenter pour approbation, il y a la question : quel est l’impact environnemental? »

AL13 : Est-ce que c’est difficile de concilier les deux?

LL :  Je peux vous dire qu’il y a des projets qui ne sont pas acceptés. Ils seraient peut-être intéressants sur le plan financier ; cependant, du côté environnemental, il manque quelque chose.

AL13 : Il y a aussi la question de l’acceptabilité sociale?

LL : C’est une de nos valeurs, le développement durable.

AL13 : Comment ça se traduit dans l’entreprise?

LL : On a annoncé qu’on avait l’ambition d’atteindre zéro émission nette d’ici 2050. Comment va-t-on y arriver? On a ELYSIS. L’aluminium, on fait ça de la même façon depuis 135 ans. ELYSIS est révolutionnaire comme processus, puisqu’il n’y a pas de consommation de carbone. ELYSIS n’est pas un produit à zéro carbone parce qu’on a une façon d’éliminer quelque chose quelque part : le processus lui-même est à zéro émission de carbone.

On a annoncé qu’on ne construirait plus de nouvelles alumineries, à moins que ce soit une usine carboneutre, donc une usine ELYSIS.

Pour les affineries à l’extérieur du Québec, on a des projets en fonction de la technologie pour éliminer les émissions de carbone afin de faire en sorte que l’alumine qui va venir alimenter nos alumineries ait une empreinte carbone plus faible.

L’une des premières choses que j’ai faites, lorsque je suis devenu trésorier, c’est renégocier notre facilité de crédit de 1,25 milliard pour incorporer un item dans le développement durable. Si on dépasse notre objectif, on a une petite réduction du taux sur facilité de crédit. Sinon, on a une pénalité. Ça illustre que, même sur le plan financier, on a osé se commettre. On y croit, on pense qu’on va les dépasser. Et on a le support de notre consortium de 203 banques.

AL13 : C’est une tangente que prend de plus en plus aussi le gouvernement du point de vue du financement, des projets du genre ELYSIS?

LL : Ça a pris du temps, depuis les années 80, mais ça fonctionne. On a produit de l’aluminium de qualité commerciale sans carbone.

On avait une petite cuve avec la technologie d’anodes inertes qui fonctionnait à Pittsburgh. Ce qu’Alcoa a apporté au partenariat avec Rio Tinto et le gouvernement du Québec, c’est la technologie. La technologie fonctionnait à petite échelle, mais il fallait monter d’échelon. La cuve du centre de recherche d’ELYSIS a montré qu’on pouvait produire du métal de qualité commerciale.

La prochaine étape est de construire des cuves ELYSIS de grandeurs commerciales qui vont opérer à 450 000 ampères à Alma. Elles seront en production en 2023 et elles seront de tailles similaires à la technologie AP30.

Le but est qu’ELYSIS puisse, en 2024, octroyer la première licence à une aluminerie pour la technologie et que le premier métal soit produit dans cette aluminerie en 2026.

AL13 : Est-ce qu’on sait qui va être le premier repreneur de la technologie?

LL : Il y a deux partenaires qui sont producteurs, il faut s’entendre à savoir qui va être le premier. On ne peut pas être les deux en même temps à déployer la technologie en parallèle, ça n’aurait pas de sens ; ça demanderait trop de ressources à l’équipe d’ELYSIS. Un partenariat serait possible, comme ABI avec Rio, mais on n’est pas encore là. Le focus est vraiment les cuves en 2023, de les opérer et d’avoir les indicateurs de performance pour valider la technologie dans des cuves de grandeurs commerciales. Après, on pourra discuter de la prochaine étape. On s’entend super bien avec Rio Tinto par rapport à ELYSIS ; c’est un compétiteur, mais on veut tous les deux qu’ELYSIS fonctionne.

AL13 : Si on se projette dans un monde idéal, est-ce que cette technologie pourrait être déployable au niveau planétaire?

LL : Déployer une technologie verte dans un endroit où la source d’énergie ne l’est pas, comme avec des centrales thermiques au charbon, je ne vois pas pourquoi quelqu’un ferait ça. La source d’énergie est un élément important.

AL13 : Est-ce que l’avenir d’Alcoa et celui de l’industrie s’orientent en fonction des procédés comme ELYSIS?

LL : L’industrie doit se décarboniser. Ça veut dire tant par la source d’énergie que par la technologie. Pour Rio Tinto et nous, c’est ELYSIS. Nos compétiteurs essaient de développer leurs propres technologies pour y arriver. On pense être en avance sur les autres avec ELYSIS. Avec notre objectif zéro émission nette d’ici 2050, c’est là qu’on s’en va.

On a aussi ASTRAEA, qu’on est en train de développer sur le plan du recyclage. Ce que ASTRAEA vient faire, c’est recycler des rebuts postconsommation, la scrap sale, en filtrant les impuretés pour produire de l’aluminium d’une très grande pureté. C’est encore dans la RD, un peu en arrière d’ELYSIS dans le cadre de la commercialisation de la technologie. On s’attend à ce que la demande d’aluminium provenant du recyclage augmente beaucoup dans les prochaines années.

AL13 a remis à M. Langlois l’édition vintage du magazine, spéciale 30 ans du CQRDA.

La crise économique pourrait bouleverser les plans de relance après la pandémie. Dans un contexte géopolitique sous tension, Louis Langlois aborde les enjeux et défis à relever.

AL13 : On parle d’avenir, mais la situation actuelle est difficile. Il y a la crise énergétique en Europe, la guerre en Ukraine et une possible récession. Le prix de l’aluminium a reculé dans les derniers mois et on peut anticiper une baisse de la demande. Comment voyez-vous les prochains mois?

LL : On a amélioré grandement notre bilan au cours des dernières années. Notre dette totale a fondu comme neige au soleil. Le but est de nous positionner pour que, lorsque ce sera le bon moment de déployer ELYSIS, on va être en mesure de le faire. C’est vraiment l’un des premiers objectifs qu’on s’est donnés.

Plus de 80 % de l’énergie utilisée aujourd’hui dans nos alumineries mondialement est renouvelable. On travaille pour continuer à augmenter ce pourcentage. On a des contrats d’énergie relativement à long terme dans nos différentes alumineries, incluant celles en Europe, ce qui fait qu’on n’a pas trop souffert de la hausse. Certaines de nos activités sont plus affectées, comme notre aluminerie en Norvège et notre raffinerie en Espagne.

Par contre, pour ce qui est des matières premières, l’inflation, la main-d’œuvre, tout ça vient compresser nos marges. Même si le LME (la bourse où sont transigés les métaux, dont l’aluminium) vaut entre 2 200 et 2 300 $ la tonne, ça devient plus difficile. Le coût des matières premières a augmenté de manière significative. Depuis le début de la COVID-19, on connaît des hauts et des bas. On a une industrie cyclique. Les cycles dernièrement se sont raccourcis en étant toujours aussi hauts et aussi bas. C’est pourquoi, être dans une bonne situation financière et avoir des usines résilientes au marché, ça nous permet de continuer à investir.

AL13 : L’incertitude est plus grande que jamais…

L’incertitude est plus grande avec le conflit en Ukraine. La Chine est aussi un joueur qu’on doit toujours regarder. Présentement, les producteurs d’aluminium chinois continuent d’opérer à l’intérieur des limites qu’ils se sont imposées dans la production, mais ils pourraient décider de repartir un paquet d’alumineries et d’inonder le marché. On a donc des items qui sont totalement hors de notre contrôle, ce qui fait qu’il y a une incertitude dans le marché.

AL13 : Quelle est la marge de manœuvre d’Alcoa dans ces conditions?

LL : On fait des représentations auprès des gouvernements et de différents organismes qui représentent l’industrie de l’aluminium, au Canada, aux États-Unis et au niveau mondial. On a envoyé une lettre récemment au LME par rapport à l’aluminium russe. On s’est engagé au début du conflit de ne pas vendre ni d’acheter de produits venant de la Russie. On a aussi pris position pour faire retirer les produits russes du LME.

AL13 : Quel est l’impact de ces décisions pour Alcoa et l’industrie?

LL : C’est sûr que la Russie peut envoyer son métal ailleurs. On est un marché mondial. Les Russes continuent de produire et d’envoyer leur aluminium dans d’autres pays, ce qui vient changer un peu la logistique d’où on envoie notre métal normalement. En théorie, si on était dans un marché qui fonctionnait à la perfection, il y aurait des usines qui fermeraient en raison des prix de l’énergie, ce qui viendrait équilibrer un peu le LME. Il y a beaucoup d’alumineries qui sont la propriété de fonds publics ; elles peuvent ainsi survivre plus longtemps, ce qui apporte un peu de distorsion dans le marché.

AL13 : Pour l’Amérique du Nord, comment voit-on la demande? Dans quels secteurs?

LL : On voit encore une forte demande, surtout en fonction de la valeur ajoutée, mais aussi dans le secteur de l’automobile et de l’emballage. C’est sûr que, si on se dirige vers une récession en Europe et même au-delà de ce continent, la demande pourrait diminuer.

AL13 : Dans un contexte où les usines d’Alcoa au Canada tournent presque à plein régime, leur rôle est limité dans le contexte actuel?

LL : Tout à fait. Alcoa redémarre une aluminerie au Brésil, une annonce faite depuis plus d’un an, et on devrait avoir complété le redémarrage d’ici la fin de l’année. On avait la possibilité de signer un contrat à long terme pour de l’énergie renouvelable, ce qui justifiait l’investissement.

AL13 : Il y a une préoccupation plus grande par rapport à la consommation d’énergie. Vous êtes vous-même le plus gros client d’Hydro-Québec. Qu’est-ce que cela vient changer pour vous comme consommateur d’électricité?

LL : Toutes nos alumineries du Québec sont déjà couvertes par des contrats à long terme. On doit prévoir qu’on va devoir renouveler ces contrats dans les prochaines années. C’est certain que, pour déployer ELYSIS, il va falloir s’assurer qu’on a un contrat à long terme pour justifier l’investissement. Il ne faut pas oublier que, si Hydro-Québec a été aussi performante dans le passé, c’est à cause des alumineries qui ont payé les mises de fonds pour beaucoup de barrages. Bon an mal an, on consomme beaucoup d’énergie. On est un client fidèle d’Hydro-Québec. Récession ou pas, nos alumineries continuent d’opérer et on demeure un joueur économique important au Québec. On n’est pas une entreprise qui, en temps de récession, va fermer une usine.

AL13 : La main-d’œuvre demeure la base. Tout comme Rio Tinto, vous subissez les répercussions de la pénurie de personnel?

LL : On est un employeur de choix. On a de belles choses à offrir. Même si on est à Montréal, on a la possibilité d’occuper des rôles mondiaux avec des responsabilités au-delà du Québec. Mais on doit continuer de faire plus, comme s’assurer d’une main-d’œuvre qualifiée et mettre l’accent sur la diversité. On fait beaucoup de travail pour attirer les femmes, mais il faut travailler en amont. À Baie-Comeau par exemple, ils ont organisé des portes-ouvertes avec des filles du 3e et du 4e secondaire pour leur montrer ce qu’est une aluminerie ; ultimement, elles pourront s’inscrire dans une formation qui mène à une carrière dans l’industrie de l’aluminium.

Il faut aussi aller à l’international parce qu’on a besoin de gens maintenant. On essaie de se démarquer sur le plan de la diversité. L’aluminium est quand même un métal d’avenir et on doit le promouvoir ainsi, comme une industrie d’avenir à faible empreinte carbone.

On a eu aussi des rencontres dernièrement avec les Premières Nations en regard du recrutement. On a recommencé un dialogue avec elles pour voir ce qu’on peut faire.

AL13 : Quelle est la place de l’automatisation? Jusqu’où peut-on aller?

LL : En théorie, on pourrait automatiser presque tout, mais la question, c’est à quel coût et dans combien de temps. On va avoir besoin de beaucoup de gens dans nos usines pendant encore longtemps. Ce qu’on essaie vraiment, c’est d’améliorer les tâches, la santé et la sécurité. Automatisation ne veut pas simplement dire éliminer un emploi, mais réduire les risques et le temps de formation.

AL13 : L’intégration du 4.0, c’est une discussion en continu avec les syndicats. Ils ne veulent pas qu’il y ait de pertes d’emploi.

LL : On a de bonnes discussions avec les syndicats. Ils ne veulent pas de réduction d’emplois, mais on ne peut pas se permettre, à un moment donné, d’avoir des usines moins performantes, c’est quelque chose que personne ne veut et je crois qu’ils comprennent très bien cette situation.

AL13 : L’incertitude se fait aussi sentir sur le plan géopolitique. On en a parlé avec l’Ukraine ; toutefois, avec un possible changement d’administration aux États-Unis, on tire notre épingle du jeu comment?

LL : Le Canada est un partenaire stratégique pour les États-Unis de façon générale. Les États-Unis sont un importateur net d’aluminium. Ils regardent l’Europe, la production qui continue de diminuer, où des alumineries ferment, alors qu’ils refusent les produits russes. Si les États-Unis veulent construire des usines chez eux, ça prend du temps et de l’argent. Et ils devront être capables de construire plus d’énergie renouvelable pour attirer des industries qui consomment autant d’énergie qu’une aluminerie. Le cadre énergétique américain, qui est fortement déréglementé, est aussi un obstacle à la construction de nouvelles alumineries.

M. Louis Langlois et M. Gilles Déry, président-directeur général du CQRDA, étaient tout sourire au moment de conclure l’entrevue.

AL13 : Pour terminer, en tant que Québécois, qu’apportez-vous à Alcoa?

LL : Je viens de Trois-Rivières et j’ai de la famille et des amis qui travaillent dans les différentes usines d’Alcoa. Le Canada et le Québec sont super importants pour Alcoa. Il y a une compréhension de base ici, contrairement à d’autres endroits dans le monde, on n’a pas besoin de convaincre le gouvernement que l’aluminium est important. On voit l’avenir d’Alcoa ici pendant encore longtemps.

AL13 : Personnellement, que désirez-vous laisser comme marque?

LL : Je veux que les alumineries d’Alcoa au Québec demeurent compétitives longtemps, pour les 20-30 prochaines années, et même encore plus, c’est le numéro un. Je l’ai vu malheureusement aux États-Unis et ailleurs dans le monde… Quand on délaisse une aluminerie, ça devient difficile de se rattraper. Avec mes responsabilités de trésorier, je veux aussi m’assurer que, lorsqu’Alcoa sera prête à investir, on va avoir la solidité financière pour le faire, ce qui nous donne un avantage compétitif par rapport aux autres.