par Alexandre d’Astous
Les marchés d’exportation sont alléchants pour les entreprises manufacturières québécoises, y compris celles œuvrant dans la transformation de l’aluminium. Si ces marchés peuvent être intéressants, il est cependant important de bien se préparer et de ne pas s’y aventurer à l’aveuglette.
C’est le premier conseil donné par la directrice générale de SERDEX International, Nadine Brassard, qui a accompagné de nombreuses entreprises du Saguenay–Lac-Saint-Jean dans leurs projets d’exportation, dont des joueurs de l’industrie de l’aluminium.
SERDEX est un organisme régional de promotion des exportations. Il existe 20 organismes du même genre au Québec. Madame Brassard est aussi présidente de Commerce international Québec; le réseau de ces 20 organismes ont tous le même mandat, soit celui d’accompagner les entreprises de leur territoire sur les marchés d’exportation. « La préparation à l’exportation est l’une des principales forces de notre réseau, puisqu’elle permet d’éviter les échecs. En fait, elle envisage ce qui pourrait se passer et met en place des mécanismes et des solutions dès le début. De cette façon, lorsque l’entreprise est prête à exporter, elle a déjà une longueur d’avance, elle n’est pas en mode gestion d’imprévus. Il est aussi bien important d’avoir un plan fiable et crédible, car cela favorise l’accès à du financement, ce qui est très aidant quand on veut percer à l’international. »
Bien connaître son marché
La DG de SERDEX signale que l’un des premiers défis, c’est de bien connaître son marché. « Il faut prendre le temps de savoir où on s’en va, d’avoir une bonne idée des joueurs clés sur le territoire et de bien comprendre l’ensemble du marché. Ce sera ainsi plus facile de trouver des stratégies pour bien le démarcher. Il faut être attentif au client pour que la différence de culture ne devienne pas un enjeu. Même chose pour la conformité, il faut s’assurer que le produit réponde aux différentes exigences de ces nouveaux marchés. À cela s’ajoutent les défis logistiques, le transport, les douanes, entre autres. Ce ne sont pas des défis insurmontables, mais il faut bien se préparer. »

La directrice générale de SERDEX International, Nadine Brassard, souligne que chaque cas est unique et nécessite une bonne préparation pour réussir. (Photo courtoisie)
Intéressant pour l’aluminium
Madame Brassard souligne que plusieurs entreprises du secteur de l’aluminium sont actives sur les marchés d’exportation. « Nous avons accompagné plusieurs entrepreneurs qui gravitent autour de l’aluminium. Plus le produit est innovant et technologique, plus l’accès aux marchés d’exportation est naturel. Les entreprises ayant une très forte valeur ajoutée ont beaucoup plus de facilité à réussir à l’international. Ça prend un produit qui se démarque de la concurrence; il faut parvenir à faire ressortir ses éléments distinctifs avec de bons angles de communication. »
SERDEX a développé une démarche permettant d’accompagner les entrepreneurs tout au long de leur préparation. « On commence par comprendre l’entreprise, quels sont ses produits, ses clientèles actuelles, sa structure interne. Ensuite, on passe à l’étude de marché et à l’analyse de la concurrence. C’est ce qui nous permet de définir nos orientations et nos actions, puisque chaque entreprise et chaque produit sont différents. Par la suite, on établit un plan d’action qui va se coller aux besoins de l’entreprise. C’est vraiment personnalisé en fonction de la réalité de l’entreprise, en fonction de ce qu’elle veut faire et du type de produit qu’elle propose. C’est l’entreprise qui décide de ses stratégies, mais nous sommes là pour la guider et la conseiller. Le marché des États-Unis ne se développe pas comme le marché de l’Amérique latine. On ne travaille pas en Europe comme on travaille avec les pays asiatiques. On adapte les stratégies au marché », précise la spécialiste.
Aucune recette miracle
Nadine Brassard indique qu’il n’y a aucune recette précise pour réussir et que chaque situation est unique. Une des façons d’être moins vulnérable face aux crises politiques et économiques, c’est d’être diversifié. « Moins nous sommes dépendants d’un seul marché, plus nous pouvons tirer notre épingle du jeu. Chaque produit a sa stratégie et ses marchés. Il faut bien qualifier son marché. C’est très important. L’objectif, c’est de mettre le moins d’efforts possibles et que ça rapporte le maximum. Quand on vise un marché où il y a beaucoup de compétiteurs, ça coûte très cher en effort marketing et en effort de vente. La clé est de concentrer nos efforts aux bons endroits. »
SERDEX accompagne les entreprises du Saguenay–Lac-Saint-Jean depuis 25 ans. « L’exportation, c’est en changement constant. La manière de faire n’est pas comme à mes débuts comme directrice générale il y a de ça 14 ans. Les outils technologiques, la pandémie, le commerce numérique, tout cela a un impact. Les pratiques d’affaires responsables sont de plus en plus exigées, les consommateurs mieux informés. Malgré tout, le conventionnel demeure. Pour se faire connaître, il faut aller à la rencontre des gens, des clients et participer à des salons. Ça reste des incontournables. »
L’importance d’être présent
L’entreprise Dynamic Concept de Saguenay est active sur les marchés de l’exportation depuis 13-14 ans. Son président, Patrice Côté, signale que, depuis la pandémie, c’est de plus en plus important d’être présent sur le territoire qu’on veut desservir. « Avec la pandémie, il y a eu un souhait des acheteurs d’avoir des circuits de livraison plus sécuritaires. Le fait d’avoir une filiale à Lyon, en France, qui s’appelle Dynamic Concept Europe, nous aide grandement pour le marché européen parce que nous sommes perçus comme un fournisseur européen. Les rendez-vous sont plus faciles, ne serait-ce que sur le plan des fuseaux horaires. Ça aurait été impossible de poursuivre notre développement en Europe sans notre présence sur place. Pour le moment, nous desservons le marché des États-Unis à partir d’ici, mais nous envisageons nous y implanter », mentionne celui qui est aussi le fondateur de l’entreprise spécialisée dans la fabrication d’équipements de procédés très automatisés pour la production et la transformation de l’aluminium.

Le fondateur de Dynamic Concept, Patrice Côté, indique que les choses ont changé depuis la pandémie de la COVID-19. (Photo courtoisie)
Plusieurs étapes de développement
Fondée en 2005, Dynamic Concept exporte ses produits en Europe, aux États-Unis et un peu au Moyen-Orient. « Il y a eu plusieurs étapes. Nous avons commis quelques erreurs. Il a fallu se réaligner. Dès le départ, il était essentiel de se faire connaître parce que nous étions une jeune entreprise. Nous avons participé à des expositions pour nous faire des contacts en direct. Nous avons mis beaucoup d’énergie sur des marchés en émergence comme le Japon, le Brésil et la Chine, mais ce ne fut pas un grand succès en termes de profits par rapport aux dépenses. Nous avons alors misé sur les avantages de nos produits, qui sont de haute technologie, et nous avons ciblé les marchés les plus favorables à ce qu’on avait à offrir. C’est à ce moment que nous nous sommes établis en France pour être plus près de nos clients et leur offrir un meilleur service », raconte le président.
Patrice Côté conseille aux entreprises qui envisagent l’exportation de commencer par déterminer quels sont leurs produits distinctifs. « Quels sont les avantages que nos produits apportent, ce qu’on appelle la proposition de valeur. Ensuite, il faut trouver le marché auquel nos produits répondent le mieux et qui vont devenir nos produits phares. C’est à ce moment qu’on a décidé de mettre plus d’énergie sur l’Europe et les États-Unis, qui sont intéressés par des produits plus technologiques. Nos produits apportent une solution à ces marchés », mentionne celui qui estime que le marché américain a un fort potentiel pour son entreprise, potentiel qui n’est pas encore exploité à son maximum.
Dynamic Concept exporte une quinzaine de produits phares. Son président voit comme un avantage le fait que son entreprise soit présente sur plusieurs marchés, elle est donc moins dépendante des crises ou des conflits politiques. Le respect des droits humains et de l’environnement est de plus en plus important pour les acheteurs. « Le prix est un facteur, mais n’est pas nécessairement le facteur prédominant. Il y a une mouvance depuis quelques années. »