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par Jonathan Thibeault

Dans un contexte d’instabilité commerciale et de chaînes d’approvisionnement fragilisées, les entreprises qui misent sur une diversification stratégique de leurs fournisseurs augmentent leur capacité à affronter les crises. Une vision à long terme, graduelle et planifiée est essentielle pour assurer la résilience de leur modèle d’affaires.

Les récents bouleversements économiques ont mis en lumière une vulnérabilité récurrente dans l’écosystème exportateur québécois : la dépendance à un fournisseur ou à un marché unique. Une réalité que Nadine Brassard, qui accompagne au quotidien des entreprises à l’international, voit revenir trop souvent :

« Une entreprise qui repose sur un seul fournisseur s’expose à des risques majeurs. Si ce fournisseur ferme, augmente ses prix ou modifie ses conditions, l’entreprise se retrouve en situation critique. »

Nadine Brassard, présidente de Commerce International Québec. (Photo: Prayanama)

Pour éviter ce type de scénario, la diversification des approvisionnements devient une priorité. Toutefois, elle ne s’improvise pas.

« Diversifier, ce n’est pas réagir sous l’impulsion d’un événement ponctuel, comme un tarif douanier ou une crise géopolitique. C’est une décision d’affaires réfléchie, qui s’intègre à une vision globale de l’entreprise », insiste-t-elle.

Penser diversification à long terme

La diversification des fournisseurs peut se faire à l’échelle locale, inter-provinciale ou internationale, selon les besoins. Mais peu importe la provenance, le principe reste le même : éviter de tout miser sur une seule source. « Il faut y aller une bouchée à la fois. Une stratégie de diversification réaliste et graduelle permet de mieux absorber les chocs, sans épuiser les ressources internes », précise Mme Brassard.

L’objectif n’est pas de rompre avec ses partenaires existants, mais plutôt de développer des alternatives. « On peut très bien conserver un fournisseur principal, mais avoir en parallèle des options de rechange déjà validées. Cela permet de réagir rapidement si une crise survient. »

Des alliances stratégiques à bâtir maintenant

Nouer des relations durables avec plusieurs partenaires, incluant des fournisseurs secondaires ou des distributeurs spécialisés, demande du temps et de l’anticipation. « On voit encore des entreprises, qui entament une recherche de nouveaux fournisseurs uniquement lorsqu’une crise éclate. Malheureusement, à ce moment-là, il est souvent trop tard pour bâtir une relation de confiance. »

Une analyse rigoureuse est nécessaire pour évaluer la pertinence de chaque fournisseur potentiel, tant sur le plan économique que stratégique.

« On doit se poser les bonnes questions : ce fournisseur sera-t-il encore compétitif dans trois ans ? Et si les tarifs changent ? Son produit est-il normé pour les marchés qu’on vise ? », illustre Mme Brassard.

Résilience et compétitivité à la clé

La diversification, même si elle implique des investissements sans garantie immédiate de retour, demeure un levier puissant de compétitivité. « Certaines entreprises hésitent à s’engager dans cette voie parce qu’il n’y a pas de contrat à court terme. Pourtant, c’est un risque qui peut rapporter gros. » Une étude de Commerce International Québec révèle d’ailleurs qu’une entreprise ayant diversifié ses exportations peut multiplier par cinq la valeur de ses ventes.

Ce principe s’applique aussi à l’approvisionnement. En réduisant la dépendance à un marché ou à un fournisseur unique, les entreprises se donnent une marge de manœuvre plus large, une capacité d’adaptation renforcée, et un pouvoir de négociation accru.

« Les entreprises les plus diversifiées sont souvent celles qui s’en sortent le mieux en période de turbulence. Diversifier, ce n’est pas un luxe, c’est une stratégie de survie », conclut Mme Brassard.