par alexandre d’astous
La propriété intellectuelle est souvent un actif sous-estimé et sous-déclaré par de nombreuses entreprises québécoises.
Au Canada, c’est l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) qui est responsable de l’administration et du traitement de la majorité des dossiers de la propriété intellectuelle (PI).
L’organisme explique que la PI peut prendre la forme d’une invention, d’un logo, d’une image, d’un design, d’une œuvre littéraire ou de toute autre forme de création. La plupart des entreprises, peu importe leur taille ou leur secteur d’activité, détiennent une forme ou une autre de PI.
Les droits de PI, comme les brevets et les marques de commerce, constituent la protection juridique de la PI. Les droits de la propriété intellectuelle encouragent l’innovation en donnant aux créateurs le droit exclusif d’empêcher d’autres personnes de voler leur innovation, soit leurs « actifs incorporels », ou de se l’approprier.
Les droits de PI ont une portée territoriale. Un brevet canadien, par exemple, accorde à un créateur ou à une entreprise le droit d’empêcher autrui de fabriquer, d’utiliser ou de vendre leur innovation au Canada, c’est-à-dire le pays où le brevet a été octroyé.
Un avantage concurrentiel
Selon l’OPIC, les actifs de la PI peuvent aider les entreprises à acquérir un avantage concurrentiel et à favoriser les possibilités de croissance et de revenus. « Si votre gestion des actifs de la PI est harmonisée stratégiquement avec vos objectifs commerciaux, vous pourrez vous prévaloir de cette stratégie, qui vous permettra de maximiser la valeur de votre entreprise », répond l’organisation au magazine AL13.
L’organisme fédéral souligne que les considérations relatives à la PI sont importantes pour la plupart des entreprises, mais que le portefeuille de PI varie. « Dans les industries de transformation, l’utilisation de secrets commerciaux et de brevets est courante. Les nouveaux matériaux, les fonctionnalités supplémentaires ou les nouveaux produits sont souvent protégés par des brevets. »
Plus complexe dans l’industrie de l’aluminium
Dans le cas de l’industrie de l’aluminium, la situation est particulièrement complexe. L’OPIC souligne que le Québec a de grands joueurs (Rio Tinto, Alcoa, Alouette) et qu’il peut aussi se vanter d’avoir une panoplie d’industries plus petites; ces dernières transforment l’aluminium produit par ces grandes entreprises et en font des produits de tous les jours (contenants, appareils électroménagers, pièces de voiture, entre autres). Ainsi, un produit X, développé par une entreprise A, peut être intégré dans la fabrication d’un produit Z, qui sera développé par l’entreprise B.
L’OPIC a pour mandat d’offrir aux clients des produits et services de PI de qualité supérieure, de sensibiliser les Canadiens à la PI et de leur permettre d’utiliser plus efficacement les droits de propriété intellectuelle. L’OPIC traite les demandes de PI pour la protection au Canada. C’est‑à‑dire que toute demande de PI, qu’elle provienne du Canada ou de l’étranger, est traitée par l’OPIC, à l’exception des obtentions végétales; il s’agit d’une forme de protection de PI permettant aux sélectionneurs de plantes de protéger leurs nouvelles variétés de la même façon qu’un inventeur protège une invention avec un brevet.
Pour éviter le copiage
Pour le président et fondateur du Groupe MAADI de Varennes, Alexandre de la Chevrotière, le fait de faire breveter une invention ou une innovation permet de la protéger contre le copiage, qui est malheureusement présent dans la transformation de l’aluminium, comme dans d’autres industries.

Groupe MAADI œuvre dans la fabrication de structures en aluminium marine, civile et militaire. (Photo courtoisie)
Groupe MAADI est un fabricant de structure en aluminium marine, civile et militaire. « Nous voulons protéger nos acquis, qui sont réalisés avec beaucoup d’efforts et beaucoup d’argent mis en recherche et développement. Quand nous développons des choses, nous avons plusieurs yeux pointés sur nous. Il y a beaucoup de copies qui se font par des entreprises sans scrupules qui vont y aller en coupant les prix. Ce ne sont pas des entreprises qui innovent. Elles se servent des innovations des autres pour prendre des parts de marché. Elles peuvent se permettre de soumissionner plus bas parce qu’elles n’ont pas les dépenses liées à la RD », explique M. de la Chevrotière.
Une protection, mais à gros prix
Le brevet permet de protéger une entreprise contre le copiage, mais il coûte très cher. « Une innovation peut contenir un ou plusieurs brevets tout dépendant de sa complexité. C’est la seule façon qu’on a trouvée pour protéger nos acquis. On ne peut malheureusement pas tout faire breveter. Il faut faire des choix. Dans l’industrie, en ce moment, il n’y a pas énormément d’appels d’offres pour des projets en aluminium, il y a donc beaucoup de compétition quand il y en a un. Les marges bénéficiaires présentent une baisse marquée. Les entreprises qui n’investissent pas d’argent en innovation ont beaucoup moins de frais qu’une entreprise qui, comme la nôtre, y met beaucoup d’argent. Ça arrive qu’on se fasse copier », déplore M. de la Chevrotière.
Groupe MAADI fait partie des entreprises du secteur de la 3e transformation de l’aluminium qui s’engagent beaucoup dans l’innovation. « Nous sommes dans une période difficile. La COVID-19 a ralenti beaucoup de choses, à cela s’ajoute la pénurie de main-d’œuvre et, maintenant, une récession commence à se profiler. Nos efforts en innovation coûtent très cher et ces éléments sont autant de facteurs qui freinent nos ardeurs. C’est beau d’avoir un brevet, mais il faut aussi avoir la capacité de le défendre dans un procès, ce qui implique encore là beaucoup d’argent », affirme le président.

Un brevet coûte entre 25 000$ et 30 000$ par pays et dans une seule langue. (Photo courtoisie)
Groupe MAADI possède huit brevets et un autre est en cours de PCT. « Nous sommes très sélectifs dans ce qu’on veut protéger. »
Un atout majeur
La Chambre de commerce du Montréal métropolitain est d’avis que la propriété intellectuelle constitue un atout économique et stratégique de taille pour les entreprises. « Pour protéger vos innovations et mieux prévoir les enjeux, la PI doit être au cœur de vos réflexions », mentionne-t-on sur le site Internet de l’organisme, qui a cependant décliné la demande d’entrevue du magazine AL13.
Propulsio 360° de Montréal, un cabinet d’avocats spécialisés en la matière, estime que toute entreprise, petite ou grande, a intérêt à identifier les actifs intellectuels, à les protéger et à les convertir en droits de propriété intellectuelle afin d’en faire un outil stratégique efficace.
Il peut s’agir d’une invention, d’une nouvelle technologie, d’une nouvelle marque, d’un logiciel original, d’un dessin novateur, d’un procédé unique et plus encore. Ces actifs ont de la valeur sur le marché tout comme les actifs matériels ou les actifs que vous pouvez tenir dans vos mains.
Pour en savoir plus
Le site Web de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) propose une variété d’outils et de ressources pour aider les entreprises à tirer parti de la PI. Ces outils comprennent des fiches de renseignements sur les divers types de PI, des feuilles de route pour le traitement des demandes, des webinaires, des vidéos, des guides sur la protection de la PI à l’étranger et des bases de données.
L’OPIC est aussi active sur les réseaux sociaux, tels que Facebook, Twitter et LinkedIn. L’OPIC fait la promotion d’activités d’intérêt pour ses clients et partenaires ou, encore, des outils et des ressources qui peuvent aider les entrepreneurs à mieux comprendre la PI.[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]