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par Jonathan Thibeault

Dans l’univers industriel du Saguenay–Lac-Saint-Jean, un projet ambitieux est sur le point d’éclore : la création d’une Zone d’Innovation Aluminium (ZIAL). Cette initiative, si elle est retenue parmi les zones d’innovation officielles du ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie (MEIE), vise à métamorphoser le secteur de l’aluminium en un véritable pôle d’innovation et de développement technologique pour la décarbonation de notre industrie. Stéphan Tremblay, en tant que directeur de projet, joue un rôle important dans la mise en place de cette zone qui pourrait changer la dynamique de la filière aluminium.

Le directeur de projet de la Zone d’Innovation Aluminium, Stéphan Tremblay, est optimiste quant une désignation prochaine du Saguenay-Lac-Saint-Jean. (Photo : Jonathan Thibeault)

Stéphan Tremblay a accepté de prendre un moment en marge de la rencontre qui a eu lieu avec les gens d’affaires, un événement chapeauté par la Chambre de commerce et d’industrie Saguenay-Le Fjord. L’ancien député fédéral et provincial, désormais directeur de projet pour la ZIAL, a une carrière marquée par un profond engagement pour le développement régional. Son parcours, riche en expériences politiques, en communications et en gestion, l’a préparé à relever les défis dans ce secteur stratégique.

« L’écosystème aluminium sans Zone d’Innovation, ce serait inconcevable! », croit-il. « Nous sommes une vallée de l’aluminium avec une riche histoire dans cette industrie. Nous disposons de chercheurs hautement spécialisés dans ce métal, sans compter un grand nombre d’industries dans la deuxième et troisième transformation. Il est clair à mes yeux que nous sommes prêts pour être reconnus comme Zone », ajoute-t-il.

Son objectif principal est de fédérer les acteurs clés autour de projets innovants et de recherche collaborative, et de démontrer au gouvernement l’existence d’une concertation régionale pour la désignation de ce créneau industriel.

Amplifier la collaboration et optimiser la RD

Une zone d’innovation est un espace géographique où des entreprises, des centres de recherche et des institutions académiques collaborent pour stimuler l’innovation et le développement technologique. Le directeur rappelle par ailleurs que l’UQAC et la Ville de Saguenay font partie des initiateurs du projet et contribuent activement aux travaux en cours menant à la désignation. De ce fait, la ZIAL aspire à devenir un modèle en matière de coopération industrielle et de recherche avancée.

Est-ce que cette désignation vise à supplanter d’autres entités déjà existantes ? L’ex-politicien clarifie : « Le CQRDA, la Société de la Vallée de l’aluminium, le Créneau d’excellence en transformation de l’aluminium, Transal et AluQuébec jouent un rôle crucial dans notre écosystème. Il existe des projets qui sont forts et qui se démarquent grâce à leurs rôles respectifs. Mon objectif est d’éviter les redondances et de miser sur les forces existantes — les compétences des équipes, les financements disponibles, et les réseaux établis. L’idée est de fédérer ces ressources pour relever des défis communs, collaborer efficacement et stimuler la recherche et l’innovation. Si nous réussissons, les organismes en place auront davantage de travail, ce qui entraînera plus de développement et d’innovation. C’est notre but ultime. Concernant les défis spécifiques à notre zone, nous avons l’avantage, grâce à notre écosystème mature et rodé, de nous concerter », souligne-t-il.

Dans l’éventualité de l’octroi de la désignation, Stéphan Tremblay propose un plan articulé autour du développement de projets collaboratifs, de la construction d’infrastructures de recherche et de l’attraction de talents et de startups. « Nous envisageons d’installer un centre de coulée collaboratif, équipé de bras robotisés de pointe, qui permettra à différentes entreprises de tester et de développer de nouvelles technologies sans interrompre la production courante de leurs clients. Cette approche réduit non seulement les coûts et partage les risques, mais stimule également l’innovation, en permettant aux acteurs de l’industrie de bénéficier d’infrastructures à la fine pointe et de collaborer sur des défis communs », indique-t-il, soulignant que ces infrastructures pourraient contribuer à exporté davantage le savoir-faire régional de la filière.

Dépasser les frontières géographiques du Saguenay–Lac-Saint-Jean

Avec la création envisagée de cette zone d’innovation, le Saguenay–Lac-Saint-Jean pourrait non seulement renforcer sa position dans le secteur de l’aluminium, mais également servir de modèle pour d’autres industries. L’initiative représente une étape pour l’avenir économique de la région, et du Québec tout entier, promettant de catalyser l’innovation et de stimuler la croissance économique à travers une collaboration renforcée et une vision partagée. « Bien que la Zone d’Innovation ne soit pas encore lancée, elle est prévue pour avoir un ancrage fort au Saguenay–Lac-Saint-Jean, tout en étant destinée à collaborer étroitement avec les universités, les cégeps, les centres de recherche privée, mais aussi les toutes les autres Zones d’innovation à travers le Québec. Cette collaboration étendue à travers la province n’est pas seulement une nécessité, mais une stratégie clé pour renforcer notre position face à la compétition internationale, dépassant ainsi les anciennes dynamiques de compétitions régionales ou nationales », rappelle-t-il, soulignant que l’époque de la compétition interrégionale est terminée et qu’il est « temps de s’unir pour que le Québec se démarque et soit un des chefs de file mondiaux. »

Intérêt du milieu : la clé de voûte

Le projet requiert une structure de gouvernance claire ainsi que des investissements à la fois publics et privés. Le directeur du projet évoque l’importance du soutien gouvernemental, essentiel pour l’organisation et le financement des activités de la zone, ce qui devrait être une formalité dans l’éventualité où le gouvernement Legault donne son aval. « L’objectif crucial pour nous est d’être officiellement désignés », explique-t-il. « Avec cette reconnaissance, nous pourrons accéder au financement nécessaire pour structurer nos activités, incluant la création d’infrastructures collaboratives. L’engagement des acteurs locaux est vital pour envoyer un signal clair de notre capacité à contribuer significativement à l’économie régionale et québécoise. […] Tout cela dépendra de notre capacité à fédérer et mobiliser l’ensemble de notre écosystème autour de projets innovants et durables », estime le directeur, précisant que la mobilisation est de plus en plus grande auprès des joueurs, tant ceux d’accompagnement que de recherche et les entreprises privées du secteur.

En dépit des nombreuses opportunités, des défis demeurent, notamment en matière de gestion de la propriété intellectuelle et de la commercialisation des projets. La Zone doit trouver des solutions pour réduire ces barrières et favoriser une collaboration efficace. « L’idée est de créer des conditions favorables au partage, car gérer la propriété intellectuelle et la commercialisation sont des défis majeurs si plusieurs entreprises travaillent sur une même idée. Ces éléments, normalement des barrières à la collaboration, seront ici abaissés. Nous proposons un cadre qui anticipe et facilite la recherche collaborative. En période de pénurie de main-d’œuvre, lorsque quatre entreprises unissent leurs efforts, elles ont besoin de moins de personnel pour progresser plus rapidement et à moindre coût. »

Et ensuite ?

Alors que la Zone d’Innovation Aluminium pourrait bien entrer dans sa phase de mise en œuvre dans les mois à venir, Stéphan Tremblay espère que le territoire fera partie de la liste des sept entités régionales à être le porte-étendard d’une industrie motrice.

« L’aluminium est toujours un métal d’avenir. Il y a encore plusieurs opportunités pour rendre ce créneau encore plus écologique. En travaillant en synergie et en ayant une structure forte, il sera possible à la fois de créer des projets porteurs, d’intéresser la relève à la métallurgie, mais surtout d’être encore plus compétitifs à l’échelle mondiale. Ça, je ne le répéterai jamais assez », conclut-il.